Simuler le second tour de l’élection présidentielle ? C’est possible !

Tout est parti de l’annonce officielle – dans le journal du même nom – des résultats du 1er tour de l’élection présidentielle. Par un réflexe quasi-professionnel j’ai « copié-collé » cela sur mon tableur avec l’idée d’imaginer l’issue du second tour. Je vous livre ici le fichier et la méthode retenue.
J’ai créé pour chaque candidat deux colonnes pour simuler les reports de voix. Par souci de neutralité j’ai posé 50% partout sauf pour les candidats qualifiés, où j’ai mis à chaque fois 100% et 0%. Il vous appartient donc en fonction de vos suppositions et/ou de vos convictions de saisir les taux de report sur l’un et l’autre candidats. C’est bien entendu toute la clé de ce fichier et son intérêt.
Il est aussi possible de tenir compte de l’abstention ou au contraire du sursaut républicain, en intégrant comme paramètre le taux de report de l’électorat considéré.
Afin d’être tout à fait clair sur la manière de pratiquer je vais prendre l’exemple du candidat n°1, Nicolas Dupont-Aignan. Je pense que tout le monde s’accordera pour dire qu’une large majorité de ses électeurs va se reporter sur Marine le Pen. Vous saisirez donc – en fonction de votre appréciation – 80%, 90% ou même 95% dans la cellule « U4 ». Il vous faut ensuite estimer à combien pourrait se monter un report de voix des électeurs du président de Debout la France vers Emmanuel Macron. Nul doute qu’il sera faible, aux alentours de 5% voire moins. Il vous faudra aussi imaginer dans quelle proportion l’électorat de Nicolas Dupont-Aignan retournera aux urnes le 7 Mai ou pas. En choisissant par exemple 75% vous décidez que 25% de cet électorat ne se déplacera pas ce jour-là. Il vous suffit ensuite de répéter l’exercice pour tous les autres candidats afin d’avoir un résultat.
Vous pouvez aussi simuler la proportion de bulletins nuls ou blancs en faisant en sorte que la somme des reports soit inférieure à 100%. Pour de nouveau prendre un exemple concret, il n’est pas interdit de supposer qu’une partie de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon va s’abstenir ou voter nul. Pour quantifier l’abstention vous choisirez une valeur inférieure à 100% en cellule « AL4 ». Idem pour les bulletins nuls en faisant en sorte que là aussi, la proportion des reports entre Emmanuel Macron et Marine le Pen soit en-dessous de 100%.
J’ai enfin créé une colonne intitulée « Prime d’avance », car j’estime que le fait pour un candidat d’arriver en tête dans un département lui fait bénéficier d’un effet d’entraînement au détriment de l’autre candidat. Par exemple, pour chaque département où Marine le Pen est arrivée en tête, ce simple fait électoral lui permet de prendre au second tour des voix à Emmanuel Macron, indépendamment des reports que nous venons de calculer. Cette « prime » est en proportion directe de l’écart entre les deux candidats au premier tour. Et comme il s’agit ici de tenir compte d’un effet de vases communicants, les voix ajoutés à l’un sont retirés à l’autre, d’où la présence d’un nombre négatif de voix. Vous noterez aussi que c’est là un jeu à somme nulle, suivant en cela la logique électorale que je veux simuler : cette voix pour un candidat est de facto une voix de moins pour l’autre candidat. Mais vous pouvez tout à fait décider de ne pas me suivre sur ce terrain et forcer toutes ces valeurs à 0, ou changer la formule à votre guise pour en atténuer ou au contraire en augmenter l’effet. Tel quel, cela donne 244 464 voix de plus à Emmanuel Macron et par conséquent 244 464 voix de moins à Marine le Pen, soit 0,51% des inscrits. C’est assez faible en soi mais cela peut peser sur les résultats d’un département.
Quant aux autres colonnes, elles présentent les résultats de manière très classique : nombre de voix et pourcentage de chaque candidat. Il y a aussi une colonne pour indiquer la participation au second tour. Voilà, tout est dit ou presque, il ne vous reste plus qu’à entrer les différents paramètres et découvrir en bas de tableau qui sera notre prochain président de la République.
Pour l’avoir expérimenté je peux vous affirmer que l’utilisation de ce fichier est attractif*, voire jubilatoire. Il est assez fascinant de regarder comment 5 ou 10% des reports de voix de François Fillon ou Jean Luc Mélenchon peuvent influer sur le résultat final. Si le système est sans doute imparfait (il faudrait pondérer les reports département par département) il n’en demeure pas moins instructif à bien des égards.

* La mode voudrait que je dise addictif mais j’ai horreur de cet anglicisme.

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Mon appel aux abstentionnistes du second tour à voter pour Emmanuel Macron.

Le premier tour de l’élection présidentielle a livré son verdict et nous aurons à choisir le 7 Mai entre Emmanuel Macron et Marine le Pen. Je tiens à lancer un message simple à celles et ceux qui bien qu’ayant voté le 23 Avril voudraient s’abstenir de se déplacer à l’occasion du second tour : pour le dire simplement ce n’est pas votre intérêt. Votre intérêt est au contraire de voter massivement pour Emmanuel Macron. Car plus l’écart entre lui et Marine le Pen sera important, plus il sera dû à votre engagement. A l’inverse, un score étriqué en faveur du fondateur d’En Marche ! lui permettra d’en conclure qu’il ne doit sa victoire qu’à ses seules troupes.
Nous ne sommes plus en 2002, Emmanuel Macron n’est pas Jacques Chirac. Si son score le 7 mai est disons supérieur aux 62% des premiers sondages de l’entre-deux tours, il ne pourra pas balayer d’un revers de main cet apport de voix. Je vais même plus loin : l’occasion est belle d’infléchir dans votre sens la politique que souhaite mettre en place Emmanuel Macron. En votant pour lui malgré votre désaccord vous l’engagez à tenir compte de vos aspirations. Pour être tout à fait clair, vous lui mettez la pression comme aiment à dire les électeurs les plus jeunes ; et plus cette pression sera forte, moins il pourra l’ignorer. Songez-y avant le 7 Mai au soir.

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Formaliser la contestation citoyenne

(Ce billet est également disponible sur Agoradem).

Si l’on reconnaît au citoyen le droit de protester contre une loi par la manifestation ou par la grève, il lui est impossible pour autant de formaliser sa contestation, manque que je souhaiterais voir combler. Encadrée pour éviter toute dérive cette nouvelle arme démocratique serait néanmoins efficace à bien des égards. Ne serait-ce que par son existence même, que le législateur ne pourra pas ignorer au moment d’écrire la loi.
Pour contester une loi il faudra être inscrit sur les listes électorales, condition nécessaire et suffisante ; on ne pourra toutefois contester qu’une loi par année civile, ceci afin d’éviter l’utilisation abusive de ce dispositif. Responsable et responsabilisé, le citoyen devra choisir son combat ; son engagement n’en sera d’ailleurs que plus fort. Ceci se passera en mairie où, devant un officier d’état civil il formalisera son opposition. Cette démarche devra être entreprise au plus tard dans le mois qui suit le vote final de la loi, pour ne pas rallonger inutilement le débat.
J’avais imaginé au début de ma réflexion un dispositif coercitif, à savoir qu’à partir d’un certain seuil (disons 2% du corps électoral) la loi devait retourner devant le parlement. Mais j’ai abandonné cette idée et je préfère maintenant insister sur la publicité de la contestation et son décompte, les préfectures ayant obligation de publier les chiffres chaque semaine. Ainsi, l’opposition à la loi se mesurerait de manière incontestable, ce qui constituerait en soi une vraie nouveauté. Aux partisans et opposants de la loi en question d’en tirer ensuite les enseignements.
C’est bien entendu une ébauche et les pistes d’amendements sont nombreuses. Faut-il limiter la contestation à une seule loi par an ? Faut-il exclure de la contestation la loi de finance ou les lois dites d’exception ? Quelles protections de la liberté individuelle du citoyen mettre en place, lui qui devra décliner son identité pour contester mais dont la contestation doit in fine rester anonyme* ? Que devient le formulaire une fois rempli et signé ? Le citoyen pourra t-il reprendre sa signature ? Si ce sont là des dispositions annexes au cœur de la loi que je souhaite voir mettre en place ils méritent néanmoins discussion.
En tout état de cause notre démocratie se grandirait avec la mise en place d’un dispositif que je crois unique au monde.

* Une piste à explorer serait que l’officier d’état civil s’assure de l’identité du citoyen et de son aptitude à contester mais que le formulaire, lui, soit anonyme.

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Que faire pour les prisons ?

Une fois de plus les députés se penchent sur le délicat problème des prisons. Le constat est pourtant connu depuis des années et partagé – chose rare – par tous les bancs de l’assemblée nationale. Il peut se réduire à trois points : surpopulation carcérale, vétusté des locaux, manque de personnels. Les points de blocage sont donc sur les remèdes à appliquer et non pas sur le diagnostic. Je présente ici mes propositions, sans aucun a priori.

Surpopulation carcérale

On ne le sait pas assez ou bien on ne le dit pas assez mais il ne devrait pas y avoir en France de surpopulation carcérale, simplement parce que les détenus ne sont pas tous – loin de là ! – en train de purger leur peine. Près d’un tiers d’entre eux sont incarcérés sous le régime de la détention préventive, c’est-à-dire en attente d’être jugé. La justice étant elle aussi encombrée les délais s’allongent, au point que nous arrivons souvent à ce paradoxe où l’accusé est reconnu coupable par le tribunal mais aussitôt libéré car la peine prononcée couvre en totalité « la préventive ». Cette situation est intenable pour les deux parties : pour le coupable d’abord, qui aura passé toute sa détention comme innocent, puisque non jugé. Intenable pour les victimes et les parties civiles ensuite, qui assistent après un procès souvent éprouvant à non pas l’emprisonnement de l’accusé puisque reconnu coupable mais au contraire à sa remise en liberté. On voit à la lumière de ce cas – qui n’est pas théorique ! – qu’il faut au plus vite réformer les conditions de la détention préventive. A mes yeux elle ne doit plus se faire en prison mais dans des centres de rétentions, un peu à l’image de ce qui existe pour les étrangers en situation irrégulière. On ne progressera pas sur le sujet « surpopulation » sans traiter spécifiquement ce cas de manière législative ou règlementaire.

Vétusté des locaux

Si la prison est avant tout un lieu de privation de liberté il n’y a pas de raison pour qu’il soit en plus un lieu de dégradation de la dignité humaine. Pour l’instant la rénovation des bâtiments ou la construction de prisons neuves existent mais que ce soit pour l’un ou pour l’autre cela prend du temps. Et puisqu’il faut aussi lutter contre le désoeuvrement en prison pourquoi ne pas affecter plus souvent les détenus à l’entretien des locaux ? C’est là une piste que je souhaiterais voir explorer davantage.

Manque de personnel

J’ai été choqué d’apprendre deux choses sur ce sujet : d’une part que le nombre de surveillants d’une prison est décidé par la loi en fonction du nombre de cellules. Cela veut dire que – quand bien même tous les acteurs auraient la volonté d’embaucher du personnel supplémentaire – cela ne peut pas se faire car le nombre maximal de personnels pour une maison d’arrêt donnée est « capée » par la loi. L’autre chose qui m’a choqué est d’apprendre qu’à la prison de Fresnes (et j’imagine que ce doit être le cas dans beaucoup d’autres prisons) près de 70% des surveillants ne sont pas titulaires.
En conséquence les solutions sont simples à écrire : abandonner ce numerus clausus qui ne dit pas son nom et n’embaucher que du personnel sous statut. A ceux qui répliqueraient qu’il y a déjà trop de fonctionnaires en France je répondrais volontiers que oui, mais qu’à défaut de réduire leur nombre en valeur absolue nous pourrions au moins transférer à la surveillance des détenus les EQTP* réputés surnuméraires ailleurs.
Une autre idée à creuser est de rendre le métier attractif. Ici les vieilles recettes sont souvent les meilleures et je ne vois qu’une piste à explorer : faire bénéficier les surveillants d’avantages corporatistes, en tête duquel un départ avancé en retraite. Croyez-moi sur parole : écrivez dans le statut du surveillant de prison** qu’il partira à la retraite à 58 ans avec un taux plein à condition d’avoir servi 35 ans et les difficultés de recrutement disparaîtront comme par magie.

Lutte contre la récidive

Je ne peux pas m’empêcher de parler de ce sujet car la majorité des détenus sont déjà passés par la case « prison ». Alors oui la détention est une punition mais on ne pourra pas lutter efficacement contre la surpopulation carcérale si l’on se contente d’enfermer le coupable pour le temps de sa peine sans jamais s’occuper de lui d’un point de vue social, ni préparer sa sortie. L’idéal serait de réussir sa réinsertion mais j’ai souvenir d’un rapport parlementaire qui évoquait cela en soulignant – oh paradoxe ! – que le temps d’incarcération était soit trop court, donc pas assez de temps pour mettre en place un programme cohérent, soit trop long et là c’est le détenu qui ne voyait pas l’intérêt de se projeter sur un « après » qu’il considère comme inexistant.
C’est – entre autres – pour cette raison que je suis pour la conservation d’un système de réduction automatique de la peine. A contrario, j’estime que toute peine de prison ferme doit inclure un temps minimal d’incarcération car la privation de liberté se doit d’être réelle, tangible pour le coupable.

(*) Equivalent Temps Plein, terme technocratique pour dire « emploi ».
(**) Comme il a toujours été d’usage sur ce blog le féminin est implicite.

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