Réquisition de logements vides : de la coupe aux lèvres.

C’est une revendication récurrente de certaines associations : la réquisition de logements vides serait une solution supplémentaire d’hébergement qui contribuerait à réduire la crise que connaît ce domaine. Mais à l’image du proverbe, dès que l’on imagine comment cela se passerait concrètement l’on découvre qu’il y a loin de la coupe aux lèvres.
Commençons par la réquisition en elle-même : sans un texte de loi pour l’autoriser point de réquisition. Et pour commencer ma démonstration qui pour réquisitionner ? Le maire, le département, la région, un organisme dédié ? Pour avancer dans la discussion passons outre ce détail et disons qu’une fois le débat clos et la loi votée, la réquisition devient effectivement possible. Mais de quelle manière réquisitionner les logements ? S’agit-il de les racheter à l’image du droit de préemption ou bien s’agit-il de les occuper le temps d’un bail ? De ce qu’en demandent les associations nous serions plutôt dans le second cas de figure. Là aussi admettons les obstacles juridiques levés et les logements réquisitionnés pour de bon.
Vient alors le temps de l’installation de la personne ou de la famille. Les associations le savent bien mieux que moi, les dossiers s’accumulent et la demande est forte voire très forte. Comme selon toute vraisemblance peu de logements seront disponibles, peu de familles seront élues. En outre les associations devront composer avec la taille du logement réquisitionné : pas question pour elles d’attribuer un deux-pièces de 40m2 à une famille de 6 personnes.
Finalement, après toutes ces péripéties nous avons un logement et des locataires prêts à l’occuper. Mais alors, nouvelle interrogation : qui va payer le loyer, les charges ? Puisqu’il est question de réquisition l’idée sous-jacente est une occupation gracieuse des lieux par les occupants, cela est la logique même. L’association ou l’organisme de gestion devrait donc pourvoir à tout et le locataire à rien du tout ? Quand même pas. Quel que soit le mode d’occupation du logement il y aura des charges à payer voire des travaux d’aménagement ou de rénovation à mener.
Enfin dernier écueil et non des moindres, celui de la durée d’occupation du logement réquisitionné : Doit-elle être limitée dans le temps avec comme perspective – oh comble ! – un avis de quitter les lieux ou bien va t-on installer les familles sous le régime d’un bail qui ne se terminerait jamais ?
Pour moi la conclusion de tout ceci est limpide : c’est que la réquisition de logements vides n’est pas une solution. Pas tant à cause du principe en lui-même mais parce que la mise en place pratique de la réquisition est impossible à mettre en oeuvre : car une fois qu’il occupe les lieux le locataire n’a plus aucun moyen de sortir de là où on l’a mis, sauf par sa propre volonté. A vouloir faire le bien coûte que coûte les associations ne feront que créer un assistanat de fait en installant des familles dans un confort qu’elles ne voudront pas quitter, qu’elles ne pourront plus quitter surtout.
La proposition que je formule est toute autre : il s’agirait de créer un système de logements intermédiaires, une sorte d’habitat low cost en quelque sorte pour être en mesure de proposer un appartement décent à disons 100€ de loyer mensuel. Aujourd’hui – pour le dire vite – il n’existe rien entre le HLM et le squat ; or j’estime que c’est ce manque qui doit être comblé au plus vite.
Lorsque je vois comment l’aviation a réussi le tour de force de proposer des billets accessibles à tous ou presque je ne vois pas pourquoi cela serait impossible avec le logement, combien même l’un n’a rien à voir avec l’autre. Pour préciser mon idée, l’habitation à partir de conteneurs pourrait être une solution viable. Des tentatives en ce sens existent, en France et ailleurs dans le monde. Il suffirait de concentrer davantage de moyens sur le sujet pour en limiter les inconvénients, en augmenter les avantages. Nul doute que si tout le monde y met de la bonne volonté nous pourrions avoir des logements dignes bien que simples et à des prix abordables pour les bourses les plus modestes.

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Oui, je suis pour l’accès à internet aux détenus.

Pourtant, « Non, les détenus ne vont pas avoir accès à Internet en prison » comme l’indique le journal le Monde. et de préciser : « Cette fausse information, relayée plus de 200 000 fois sur Facebook, compare les conditions de vie des détenus et celles des personnes âgées en maison de retraite. »
Je vais faire ici abstraction de la comparaison avec les maisons de retraite car il est question de l’accès à internet en prison (je ne vois pas d’ailleurs en quoi la situation de l’un devrait influer sur la situation de l’autre, mais passons).
Il n’en demeure pas moins que je suis pour que les détenus puissent avoir un accès à Internet depuis leur lieu de détention. Je me dépêche toutefois de préciser ma pensée pour ne pas créer de confusion. Notez en premier lieu que je ne parle pas « d’accès internet » mais « d’accès à Internet ». La nuance est de taille, car la première expression sous-entend « accès libre » alors que – bien entendu – l’accès à internet doit se comprendre comme un accès à un service, dans les mêmes dispositions que l’accès à un soin médical ou à un suivi social. Dans mon idée le détenu passe par son conseil qui dépose une demande d’accès. Une fois celle-ci acceptée le détenu utilise un ordinateur qui enregistrera non seulement son parcours sur le web mais également la moindre de ses frappes au clavier. Il me semble en effet paradoxal de nous expliquer qu’il est de plus en plus facile de nous « pirater » à domicile sans que nous le sachions tout en nous expliquant qu’autoriser un détenu à utiliser internet depuis une maison d’arrêt – a fortiori sur un ordinateur appartenant à l’administration carcérale – lui permettrait de passer des messages à l’insu des surveillants, voire d’organiser son évasion.
Ajoutons aussi qu’Internet est devenu indispensable à tous, au moins aussi indispensable que l’eau ou l’électricité. J’en veux pour preuve l’existence de tarifs sociaux pour permettre aux plus démunis d’entre nous d’avoir un accès minimum à la toile.
Alors oui le détenu doit avoir accès à Internet dans le cadre de son progremme de réinsertion. Mais non, il est encore trop tôt pour l’autoriser à avoir un accès internet depuis sa cellule.

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Pourquoi François Ruffin a tort de ne pas aller à Versailles.

François Ruffin, et au-delà de sa personne l’ensemble des députés du groupe « La France insoumise », ne sera pas présent au Congrès convoqué par le président de la république. C’est une décision politique mais le réalisateur de « Merci Patron ! » ne la présente pas comme telle sur son blog, ou du moins n’évoque pas en premier lieu un choix politique.
La constitution et son article 18* permet pourtant à Emmanuel Macron de convoquer le parlement (assemblée nationale et sénat) en Congrès, et comme le dit François Ruffin « juste [pour] l’écouter« . Sauf que la loi ne permet pas au Président de la République d’en faire plus dans ce cas précis. Quant à l’argument sur le thème « Je ne crois pas qu’on m’ait élu pour ça« , il est tout simplement fallacieux car assister à une séance du Congrès est tout ce qu’il y a de légitime quand on est député, quand bien même on ne serait pas d’accord politiquement avec ce qu’il pourrait se dire en cette circonstance.
Comprenons-nous bien : je ne dénie pas à François Ruffin le droit de ne pas aller au Congrès lundi, je regrette qu’il cherche à expliquer que sa décision n’est pas que politique alors que justement sa décision est exclusivement politique.

*Article 18 : [Le président de la république] peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès. Sa déclaration peut donner lieu, hors sa présence, à un débat qui ne fait l’objet d’aucun vote.

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Mon vade mecum de député novice (bien que je ne sois pas député).

– En tout premier lieu lire attentivement le règlement de l’assemblée nationale. Toujours le poser ostensiblement devant soi en séance.
– Faire une recherche internet « rappel au règlement » dans les comptes rendus de séance. Bien s’imprégner des cas et des ambiances qui prévalent lors de ces moments.
– Déjà réclamer à mon président de groupe un « créneau » pour poser ma question au gouvernement car il y a plus de 300 députés pour seulement une dizaine de questions entre le mardi et le mercredi. Je dois m’arranger pour être « visible » au moins une fois par an…
– Rendre public mon agenda parlementaire. Montrer à mes électeurs que j’occupe mon mandat à 100% car soit je suis en séance, soit je suis en commission, soit je suis dans ma circonscription.
– User et abuser de l’article 54 alinéa 4 du règlement de l’assemblée nationale, qui autorise le député à monter en tribune lors de ses prises de paroles au lieu d’utiliser le micro situé dans les allées. Ce sera là ma « marque de fabrique » dans l’hémicycle.
– Assister à un maximum de séances, surtout en début de mandat, afin d’engranger de l’expérience sur la manière de débattre des textes. Je préfère dans un premier temps « sècher » les commissions pour cause de séance publique que de sècher les débats pour cause de réunion de commission.
– En séance, se donner pour règle de ne pas prendre la parole avant, disons, 6 mois. Avant tout observer, observer et encore observer. Ceci n’est pas valide en commission.
– Rédiger au plus vite une première question écrite, histoire de « signer » ma présence.
– Rédiger aussi une première proposition de loi, volontairement consensuelle (par exemple sur le désabonnement en ligne des titres de presse*). C’est avec l’expérience que mes futures propositions de lois seront plus idéologiques …
– Ne jamais « tweeter » en séance ou en commission. Ce sera très difficile mais en se disciplinant ce doit être possible.
– Visiter sans prévenir la prison la plus proche de ma circonscription, comme la loi m’y autorise.
– Prendre connaissance tous les jours du contenu du Journal Officiel.
– Ah oui : toujours surestimer l’adversaire politique. Corrolaire, ne jamais le sous-estimer.
– Prévenir mon président de groupe que je refuserai toujours de me cacher derrière un rideau avant un vote …

* S’il est possible de s’abonner en ligne à un titre de presse, le désabonnement par le même biais n’existe pas.

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