Il faut lire les 32 propositions de la convention travail de l’UMP. Non pas parce qu’elles sont pertinentes mais parce que je considère que beaucoup d’entre elles sont au contraire « toxiques » pour le marché de l’emploi. A un moment où le chômage bat des records nous sommes en droit d’attendre un peu plus que la mise au net des fantasmes du principal parti d’opposition. Je sais bien qu’en temps de crise il faut être ouvert à toute nouvelle proposition, même celle émanant d’un autre camp que le sien ; mais force est de constater que si ce programme s’appliquait nous tomberions de Charybde en Scylla.
La première proposition donne le ton : C’est aux entreprises de négocier la durée du travail. Il ne devrait plus exister selon l’UMP de durée légale hebdomadaire, le législateur devant se contenter de fixer « les grands principes« .
La seconde proposition consiste à simplifier le code du travail. l’UMP désigne l’adversaire, l’ennemi qui ne dit pas son nom : La norme. Son « empilement a rendu [le code du travail] extrêmement complexe et incompréhensible« . Conclusion ? : « Il ne faut garder que les principes de base du droit du travail« , principe qui en vertu de la proposition n°1 ne contiendrait même pas la durée légale du travail hebdomadaire. Je me demande d’ailleurs ce qu’il resterait du code du travail s’il devait se limiter aux principes. Il serait simplifié certes, mais à quel prix !
La proposition 7 est la seule proposition de cette convention qui a priori me paraît pertinente. Créer un guichet unique de l’emploi est une piste à explorer plus avant. Est-ce que cela permettra aux chômeurs de retrouver plus rapidement un emploi ? En tout cas c’est l’objectif qu’il faudrait se fixer, pour cette proposition comme pour les autres.
La proposition 9 est – à l’inverse – l’une des plus polémistes. L’indemité chômage « ne doit plus être une somme passive« . Pour caricaturer (à peine), l’UMP considère que tout chômeur est un fainéant en puissance, qu’il est incapable de se prendre par la main pour retrouver un emploi et qu’il faut le menacer dès son premier jour de chômage. C’est déjà oublier qu’il existe des mesures qui font que l’on peut retirer ses allocations à toute personne qui ne recherche pas sérieusement un emploi. Mais l’UMP veut sans doute aller plus loin encore. Par exemple en préconisant la radiation automatique après deux refus consécutifs d’emplois « valables« . A supposer qu’on s’entende sur ce qu’ est un « emploi valable », je tiens à dire ceci à l’UMP : Proposez 100 « emplois valables » à 100 chômeurs, combien refuseront d’après vous ? 10, 25 ? Mon avis c’est que 1 ou deux refuseraient. Proposez alors à ces deux personnes le fameux « second emploi« , ils le prendront. Une fois pour toute messieurs les politiques, comprenez que ce que veut un chômeur c’est d’abord du travail.
La proposition suivante s’inscrit dans la même veine. En effet il est question que le salarié puisse s’inscrire au chômage (je simplifie, l’UMP étant par ce texte dans l’idée de son « Agence pour le Travail ») avant la fin de son contrat de travail, avec à la clé une logique implacable : « En s’inscrivant avant la fin de leur contrat (…) ils gagneront du temps dans leur recherche à venir« . Ben voyons ! Si je pousse le raisonnement de l’UMP jusqu’au bout, autant s’inscrire à vie à cette fameuse agence pour le Travail, comme ça tout le monde gagnera du temps !
La proposition 12 pourrait également mériter ses galons de proposition phare, puisque c’est la proposition anti-assistanat, un cheval de bataille de l’UMP. Je regrette beaucoup de ne pas avoir le temps de creuser plus avant cette histoire car je suis de plus en plus persuadé que c’est un mythe. Je ne dis pas que certains foyers vivent très bien sans revenus salariés je dis que ces foyers montrés du doigt vivent non seulement des allocations auxquelles elles ont droit mais aussi d’une source de revenus annexe : travail au noir, « business » ou autre. C’est cette part d’ombre qui à mes yeux entretient le mythe de l’assistanat. Faites d’ailleurs le calcul pour vous-même, ce que j’ai essayé de faire. Pourrais-je vivre de l’assistanat si je le voulais vraiment ? Non car la somme de toutes les aides auxquelles j’aurait droit ne dépasserait pas 50 à 60% du SMIC. Et même si j’avais 3 ou 4 enfants à charge, ces revenus seraient insuffisant pour faire vivre décemment une telle famille.
La proposition 25 est avec celle que je viens de discuter l’autre proposition emblématique du « monde du travail selon l’UMP ». La parole s’est libérée serais-je tenté de dire car je n’avais encore jamais entendu – et encore moins lu – ce que j’ai découvert dans cette proposition : « Nous voulons unifier les contrats de travail pour que le CDI ne soit plus un privilège* ». Voilà c’est dit, le CDI tel qu’il existe dans le code du travail est un privilège. Pour l’UMP c’est donc l’autre mal de notre société avec l’assistanat. Tuons les privilèges, empêchons l’assistanat et l’emploi s’en trouvera mieux. C’est bien entendu une ineptie sans nom, certainement inconstitutionnelle en prime que d’imaginer un contrat de travail qui garderait à la fois le « I » de indéterminé mais qui pourrait se terminer à la fin d’une « mission précise« . Les pseudos clauses (je dis pseudo car uniquement sortis des think tank de l’UMP) ne doivent pas tromper, c’est la précarité pour tous qui serait instituée si une telle mesure voyait le jour. Précarité qui mettrait au chômage bien plus de monde qu’aujourd’hui !
Autre découverte d’importance (!) « le frein à l’embauche c’est la peur du contentieux en cas de licenciement« . Je ne sais pas si c’est vrai mais ce qui est certain c’est qu’avec un tel raisonnement il ne peut qu’exister des freins à l’embauche !
Dans les dernières des 32 propositions je veux souligner celle sur les seuils, que l’UMP souhaite doubler. De mémoire je crois qu’il faut un délégué du personnel à partir de 10 salariés. Demain avec une telle loi ce serait 20. C’est bien entendu cet objectif-là qui est en ligne de mire avec une telle proposition. Demandez donc à l’UMP s’il sont prêt à préciser que les dispositions syndicales ne seraient pas touchées par cette proposition et voyez leur réponse…
Finalement l’UMP se complait dans l’opposition car quasiment aucune de ces mesures
ne permettrait de réduire le nombre de chômeurs en France. Tout ceci n’est que le catalogue des mesures idéales du patronat : un code du travail réduit à la portion congrue, une durée du travail flexibilisée au maximum, un contrat de travail institutionnalisant la précarité et un univers syndical inexistant. Triste programme.
* Le passage a été un temps en gras sur le site de l’UMP, seul le premier membre de la phrase l’est désormais…
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