La décision de l’opposition de présenter une motion de censure peut se comprendre au vu des événements de ces dernières semaines. Hélas, écrit à la va-vite et pas assez argumentée à mon goût, elle ne fera sans doute pas date.
Comme l’expliquent les auteurs(*) de cette motion de censure « la révolte naît de la question de l’impôt. » et par conséquent « Ce que réclame le peuple, c’est le respect des articles 13 et 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (…)« . N’en déplaise aux signataires je ne suis pas du tout d’accord avec leur interprétation de l’article 13 en question. Pour mieux en juger voyez sa rédaction :
« Article 13. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.« (**)
« Entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés« . Si cela a été rédigé ainsi c’est qu’avant 1789 tout le monde ne payait pas l’impôt, loin de là ; les plus riches en étaient éxonérés, ce qui n’était rien d’autre qu’un privilège. Dès lors le Déclarant a rédigé cet article pour que justement « tous » paient l’impôt, les riches comme les pauvres. C’est d’ailleurs ce principe que je défends, un impôt payé par chacun puisque chacun bénéficie des services publics.
Je vois d’ici les défenseurs de la motion m’expliquer qu’il s’agit de la suppression de l’ISF. Dont acte mais il n’en demeure pas moins que primo l’ISF était un impôt supplémentaire(***) et que secundo en tout état de cause l’article 13 n’est pas respecté à la lettre puisque – en simplifiant – les pauvres ne paient pas l’impôt.
Un peu plus loin le texte de la motion de censure parle « (…) d’un malaise bien plus profond dont sont victimes ceux qui vivent de leur travail, les retraités, les fonctionnaires, les jeunes, les locataires, (…)« . Vraiment je ne vois pas ce que « les locataires » viennent faire ici. Faut-il sous-entendre que les signataires veulent les opposer aux propriétaires, ces derniers étant pour eux des « riches » alors que les premiers seraient des « pauvres » ? Je n’ose croire à cette interprétation, aussi faudrait-il m’en donner une autre.
C’est alors qu’arrive la phrase d’après « Sur 5 ans, ce sont 25 milliards d’euros dont se prive l’Etat au profit de ceux qui en ont le moins besoin. » les signataires reviennent donc à la charge contre l’ISF ? Je dois avouer que j’ai mis un peu de temps avant de comprendre la phrase en question(****) car je ne voyais pas le rapport avec « les victimes (…) qui vivent de leur travail« . Il n’y en a pas – du moins pas directement – et je suis obligé de déduire que cette phrase aurait dû se trouver plus haut ou plus bas dans le texte mais pas là où les signataires l’ont placée.
Tout ceci pour arriver à l’argumentation principal, qui justifie cette motion de censure : l’écologie et plus précisément la manière fiscale de l’aborder. « L’écologie est l’autre grande victime de la séquence. Nous sommes convaincus qu’elle sera populaire ou ne sera pas. Elle ne peut pas servir de prétexte, encore moins aggraver les inégalités. Pour cela elle doit viser les vrais responsables du désastre écologique et doit toujours proposer une alternative lorsqu’elle impose une interdiction. »
Je cite volontairement l’extrait entier pour le pas le dénaturer car il y a manifestement dedans un contre sens. Comme l’écrivent les signataires « L’écologie est l’autre grande victime de la séquence.« , puis utilisent le pronom « Elle » pour dire écologie : « elle » sera populaire, « elle » ne peut pas servir de prétexte, « elle » doit viser les vrais responsables. L’écologie doit viser les vrais responsables, vraiment ? Non bien sûr et il faut en fait lire « la fiscalité écologique doit viser les vrais responsables« . Pour moi il y a donc contre sens puisque il n’est pas question pour personne de mettre un signe égal entre « écologie » et « fiscalité écologique« .
Alors sans doute la motion sera rejetée mais si elle peut se justifier d’un point de vue politique elle a tout de même été rédigé dans l’urgence, ce qui retire de sa force.
(*) Comme à chaque fois sur ce blog le féminin est implicite.
(**) Article copié depuis le site internet du conseil constitutionnel.
(***) Ce n’est pas le sujet de ce billet mais je ne peux pas passer sous silence que l’ISF a été remplacé par l’IFI l’Impôt sur la Fortune Immobilière. L’accusation devrait plutôt porter sur la moindre rentabilité de cette dernière.
(****) C’est le montant indiqué – 25 milliards – qui m’a servi d’indice pour comprendre de quoi il est question ici.