C’est Twittter qui m’inspire ce billet. J’ai été interpellé suite à mon message réclamant un gouvernement d’union nationale au motif que ce dernier serait un « attrape-couillons ». Au-delà de l’expression quelque peu triviale le débat reste le même : cet hypothétique gouvernement d’union nationale est-il la solution ultime pour combattre la crise ou seulement un leurre ? Je crois qu’il faut regarder cela à la lumière de trois choses. Primo le gouvernement en soi, la liste des ministères et des ministres ; secundo la politique que mènerait un tel gouvernement et tertio le parlement, tel qu’il est et tel qu’il devrait être.
Le gouvernement, s’il a vocation à être « d’union national » ne devra pas seulement avoir la couleur et la saveur de cette union, il devra vraiment incarner l’union nationale. C’est pourquoi le meilleur moyen de donner le ton serait de nommer un premier ministre « ni de droite ni de gauche ». Dans ces condition François Bayrou est le seul qui peut incarner une politique nouvelle. Les français d’ailleurs ne s’y trompent pas et le placent volontiers dans les sondages à la tête d’un tel gouvernement. Des personnalités civiles devraient aussi faire leur entrée, pour apporter un peu de fraicheur d’idées. Tout ceci n’étant qu’une affaire de noms sur une liste ce ne devrait pas être si difficile que cela, en tout cas moins difficile qu’on pourrait le croire de prime abord.
Bien plus complexe à mettre en oeuvre par contre serait la politique à conduire. N’en déplaise ici à Jean-Luc Mélenchon, notre vieille 5ème république* peut encore montrer sa verdeur. En vertu de l’article 20 c’est « le gouvernement [qui] détermine et conduit la politique de la Nation » et pas le président de la république, donc. C’est là qu’un gouvernement d’union nationale prend tout son sens : au service de la Nation, donc de nous, avec comme seul objectif de combattre la crise et de gratter des points de croissance, dixième de point par dixième de point s’il le faut. N’en déplaise également à Jean-Marc Ayrault, le gouvernement actuel – tout de bonne foi qu’il est – n’arrive pas à aller au-delà de la gestion des affaires courantes. C’est un nouvel état d’esprit qu’il faut insuffler, voire une nouvelle manière de faire de la politique.
Avec comme premier ministre quelqu’un comme François Bayrou, avec une équipe réduite façon « commando » d’une douzaine de ministres à la fois de droite (oui!), de gauche et de la société civile on aurait là un gouvernement avec à l’esprit l’intérêt général, et rien que l’intérêt général. Mesure gadget ou symbole fort, l’affichage au-dessus de la porte d’entrée de Matignon (à défaut de celle de l’Elysée) du nombre de chômeurs, telle ces horloges égrenant le temps restant avant tel ou tel événement démontrerait concrètement que l’emploi est la préoccupation de tous les instants.
Mais un gouvernement n’est rien sans un parlement pour soutenir les réformes qu’il veut mettre en oeuvre. C’est là le talon d’Achille de l’union nationale, elle ne peut pas se faire sans les députés, a fortiori contre eux d’ailleurs. Dès lors il ne reste que deux solutions : soit dans un élan de générosité (de lucidité ?) les députés acceptent de travailler pour ce gouvernement d’union nationale (d’où l’intérêt d’avoir à la fois des gens de droite et de gauche, mais surtout à sa tête un premier ministre sans préférence partisane), soit François Hollande prononce une dissolution** et demande expressement aux Français de voter pour les députés qui se présenteront sous l’étiquette union nationale. Mesure choc par excellence elle permettrait de trancher et d’enfin savoir si cette idée est un « attrape couillons » ou pas.
Ma conclusion est que l’union nationale – si elle voit le jour – devra forcément passer par la case dissolution***. Existera t-il assez de députés pour s’engager sur cette voie ? Finalement ce sont eux qu’il faudrait sonder pour le savoir…
(*) Notre 5ème république est presque aussi vieille que l’Europe.
(**) On a déjà dissout l’assemblée nationale pour moins que ça…
(***) Article 12 de la constitution.